Bien-être animal : les ambitions de la Commission déçoivent les activistes

« Le travail est en cours », a déclaré M. Šefčovič lors d’une conférence de presse, interrogé sur l’omission de grandes parties du paquet initialement envisagé. « Nous devons nous rendre compte qu’il s’agit d’un travail extrêmement technique et exigeant. » [EPA-EFE/Olivier Hoslet]

Les activistes ont dénoncé un certain nombre de failles dans les nouvelles propositions de la Commission européenne visant à instaurer des règles plus strictes sur le transport d’animaux, notamment des omissions sur l’étendue promise des mesures envisagées. 

Le vice-président de la Commission européenne, Maroš Šefčovič (S&D), et la commissaire chargée du bien-être animal, Stella Kyriakides (PPE), ont présenté jeudi (7 décembre) des propositions visant à mettre à jour et à renforcer la législation de l’UE sur le transport des animaux vivants, ainsi que sur le bien-être des chats et des chiens pendant l’élevage et la mise en vente.

Ces propositions remplacent la révision de l’ensemble de la législation européenne en matière de bien-être animal que la Commission avait initialement promise dans le cadre de la stratégie « De la ferme à la table », mais qu’elle ne présentera finalement pas sous ce mandat.

« Le travail est en cours », a déclaré M. Šefčovič lors d’une conférence de presse, interrogé sur l’omission de grandes parties du paquet initialement envisagé. « Nous devons nous rendre compte qu’il s’agit d’un travail extrêmement technique et exigeant. »

La Commission ne prévoit pas de faire d’autres propositions sur le bien-être animal avant les élections européennes de juin prochain. Il appartiendra donc à la prochaine Commission de décider à nouveau quand et quelles initiatives devraient être présentées.

Mme Kyriakides a toutefois souligné la pertinence de la révision des règles de transport des animaux que l’exécutif européen vient de présenter pour remplacer des règles vingtenaires.

Règles sur les temps de transport et les températures

Les nouvelles règles proposées pour le transport des animaux prévoient une durée de voyage maximale de neuf heures pour les animaux destinés à l’abattage. Actuellement, il n’y a pas de limite fixée par l’UE pour la durée du voyage vers un abattoir.

Pour les autres transports d’animaux vivants, la Commission propose une durée maximale de voyage de deux fois 21 heures, avec 24 heures de repos entre les deux, pendant lesquelles les animaux doivent être nourris et abreuvés.

Ces durées maximales n’incluent pas le transport maritime, ce qui signifie que, sur les navires, les animaux peuvent être transportés plus longtemps.

« Pour un voyage en mer dans des conditions normales, les risques sont moindres [que pour le transport routier] et les animaux peuvent se déplacer davantage », a déclaré un haut fonctionnaire de la Commission pour justifier l’exemption.

La Commission a également proposé de limiter les voyages à des températures extrêmes, notamment en prévoyant que lorsque les températures de jour sont supérieures à 30 degrés Celsius, le transport n’est autorisé que la nuit.

Bien-être animal : un tiers des transports d’animaux vivants dans l’UE durent plus de huit heures

Selon la Cour des comptes européenne, les différences de coûts entre les régions et l’application inégale par les États membres des règles de l’UE en matière de transport d’animaux encouragent le transport d’animaux vivants, ce qui entraîne des risques pour le bien-être animal.

Pas d’interdiction d’exportation vers des pays tiers

Par ailleurs, la proposition ne prévoit pas d’interdiction des exportations d’animaux vivants vers les pays tiers, une mesure réclamée par les défenseurs du bien-être animal et certains législateurs. Celle-ci a été mise en œuvre par l’Allemagne et le Luxembourg dans toute la mesure du possible à l’échelon national.

« D’après notre analyse d’impact, il ne s’agirait pas d’une mesure politique efficace », a déclaré la commissaire chargée du bien-être animal lorsqu’elle a été interrogée sur cette omission.

Selon elle, une interdiction signifierait que les pays tiers importeraient des animaux vivants d’autres pays plus éloignés et appliquant des normes de bien-être animal moins strictes que celles de l’UE, et aurait également « un impact négatif sur la chaîne de production de l’UE ».

L’ONG de protection des animaux Compassion in World Farming a qualifié la proposition sur le transport des animaux d’« occasion manquée ».

« Le projet de loi sur le transport des animaux montre une certaine volonté d’améliorer les règles de protection des animaux de l’UE, mais il manque manifestement d’ambition », a déclaré Olga Kikou, directrice de l’ONG.

Outre la décision de ne pas inclure une interdiction des exportations d’animaux vivants vers des pays tiers, Mme Kikou a également critiqué les « nouvelles failles » créées par l’omission du transport maritime dans les règles relatives aux durées maximales de voyage.

L’Allemagne renforce les règles relatives au transport des animaux

L’Allemagne va restreindre davantage le transport d’animaux vivants vers les pays tiers, mais sans une réglementation européenne, les mesures prises par le ministère allemand de l’Agriculture pourraient se révéler inefficaces.

Un pas en avant  ?

L’eurodéputé écologiste (Les Verts/ALE) autrichien, Thomas Waitz, a formulé des critiques similaires, mais se dit plus optimiste.

« Chaque amélioration signifie moins de souffrance animale sur les routes européennes », a-t-il déclaré dans un communiqué, ajoutant que la proposition est « un pas en avant mais qu’elle manque d’ambition en ce qui concerne les durées maximales de transport par bateau, les règles sur les températures extrêmes et des réglementations plus précises sur les exportations vers les pays tiers ».

De son côté, Animalhealth Europe, qui représente les fabricants de médicaments pour animaux, a salué l’inclusion de nouvelles technologies, telles que les systèmes de suivi numérique, dans la proposition sur le transport des animaux, affirmant que cela permettrait une « plus grande transparence ».

Selon l’association d’agriculteurs européens Copa-Cogeca, la proposition comprend « des règles restrictives qui sont loin de l’expérience pratique, qui vont à l’encontre du bien-être des animaux et qui sont discriminatoires à l’égard de certains États membres ».

Dans une déclaration, l’organisation a également averti qu’une limite de neuf heures sur les temps de transport signifierait que « les agriculteurs de certains États membres perdraient immédiatement l’accès à de nombreux abattoirs ».

Le ministre allemand de l’Agriculture, Cem Özdemir (Verts), a quant à lui déploré le fait qu’une grande partie du paquet initialement prévu n’ait pas été présentée.

« Il est regrettable que, contrairement à ce qu’elle avait promis, la Commission n’ait présenté aucune proposition visant à améliorer le bien-être des animaux dans l’élevage et l’abattage », a-t-il déclaré dans un communiqué.

L’initiative citoyenne sur l’élevage d’animaux à fourrure : des avancées timides

Pendant ce temps, le vice-président de la Commission et la commissaire chargée du bien-être animal ont également abordé l’initiative citoyenne « Fur Free Europe », dans laquelle 1,5 million de citoyens de l’UE ont demandé l’interdiction de l’élevage d’animaux à fourrure dans l’UE.

La Commission n’a pas déposé de proposition législative sur le sujet à ce stade. Au lieu de cela, les commissaires ont annoncé que l’exécutif européen avait chargé l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) d’émettre un avis scientifique sur le bien-être des animaux élevés pour leur fourrure.

Une décision sur l’action législative devrait ensuite être prise sur la base de cet avis, qui ne devrait toutefois être finalisé qu’en mars 2025.

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