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JO 2024

JO 2024 : à Tahiti, les épreuves de surf menacent les coraux

La tour des juges existante dans le lagon de Teahupoo, montée et démontée selon les besoins, doit être remplacée par une nouvelle tour en aluminium, elle aussi démontable. Ici, en août 2023.

La construction d’une tour pour les épreuves de surf aux JO 2024 inquiète les associations écologistes. Le gouvernement polynésien a décidé de suspendre temporairement les travaux.

« Nous avons suspendu le démarrage des travaux liés aux fondations de la tour des juges jusqu’au 20 novembre 2023, écrivait la ministre des Sports polynésienne Nahema Temarii sur sa page Facebook, le 28 octobre dernier. C’est la seule fenêtre qu’il nous reste pour trouver des solutions avec toutes les équipes et toutes les parties prenantes. »

Depuis début octobre, les citoyens se mobilisent contre l’installation d’une tour en aluminium dans le lagon de Teahupoo, à Tahiti. Cette nouvelle tour doit accueillir une quarantaine de juges et médias lors des épreuves olympiques de surf, prévues du 27 au 30 juillet 2024. Elle doit venir remplacer une tour en bois, utilisée chaque année par la World Surf League (WSL) lors de ses compétitions de glisse. Selon les autorités polynésiennes, la tour en bois existante ne serait pas conforme aux normes de sécurité, et ce depuis un audit réalisé en 2008 par Veritas. Contactés, la WSL et Veritas n’ont pas confirmé l’information.

« On a bien entendu qu’il y a une question de sécurité pour les quarante personnes qui devront rester sur cette tour. Mais qu’en est-il de la sécurité des quarante foyers qui vivent ici ? » interroge Aimatarii Levy, vice-présidente de Vai Ara O Teahupoo, l’association locale qui a lancé une pétition en ligne. Elle enregistre aujourd’hui plus de 130 000 signatures opposées à la nouvelle tour.


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Les associations environnementales, les résidents et les surfeurs locaux — comme le champion Matahi Drollet —, craignent que cette tour olympique ne dégrade l’écosystème marin. Pour ériger cette tour, il faut d’abord forer le sol lagunaire afin d’y couler une quinzaine de plots en béton qui serviront de fondations. Pour cela, les ouvriers de l’entreprise Boyer, mandatée pour ce chantier, devront acheminer une barge jusqu’à la zone des travaux, à 450 mètres de la côte.

« C’est impossible de passer sans dégrader les coraux, s’est inquiété Milton Parker, vice-président de l’association Atihau, sur les ondes de TNTV. Avec un bateau de 30 cm de tirant d’eau [la partie du bateau immergée dans l’eau], j’avais du mal à passer. Alors que la barge fait 80 cm de tirant d’eau. »

Une « impossible » remise aux normes

Pour rassurer la population, une démonstration de forage a été organisée par les autorités polynésiennes sur la plage de la Pointe Riri, à une dizaine de kilomètres de Teahupoo. Vai Ara O Teahupoo n’y a pas assisté. « Ça a été pour nous une offense, explique Aimatarii Levy. Le lieu de la démonstration est sablonneux. Le sol de l’implantation de la tour, c’est du platier récifal. Ça n’a rien à voir. »

De son côté, Paris 2024 déclare entendre « les inquiétudes sur le sujet » et vouloir « étudier toutes les options possibles pour améliorer le projet actuel, dans le cadre de la réglementation polynésienne en vigueur et du cahier des charges ».

La tour en bois existante ne pourrait-elle pas être remise aux normes ? « Je suis prêt à m’asseoir sur le fait que de l’argent a été dépensé pour cette nouvelle tour si on nous prouve que l’ancienne tour peut être plus conforme », déclarait le 30 octobre dans les colonnes de L’Équipe le président Moetai Brotherson. Plus tôt, le président de Paris 2024 Tony Estanguet assurait à Polynésie La 1re : « Si on pouvait l’utiliser, on l’utiliserait », précisant que les normes de sécurité étaient fixées par la Polynésie.

« On a demandé de mettre aux normes la tour en bois actuelle, de l’aménager, mais on nous a répondu que c’est impossible », tranche Aimatarii Levy. Autre solution proposée par Vai Ara O Teahupoo pour préserver le récif : placer la nouvelle tour à terre, et les juges sur un bateau.

Une nouvelle marche de contestation est prévue à Papeete, le 10 novembre prochain.

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