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WhatsApp : pourquoi un tel exode des utilisateurs

Depuis le 4 janvier et l’annonce de nouvelles conditions d’utilisation, des millions d’utilisateurs ont quitté la messagerie appartenant à Facebook. Plusieurs raisons ont pu motiver leur choix.

Le Monde

Publié le 18 janvier 2021 à 20h10, modifié le 19 janvier 2021 à 09h28

Temps de Lecture 5 min.

C’est « probablement la plus grande migration jamais vue vers une messagerie sécurisée », écrivait, vendredi 15 janvier, le lanceur d’alerte Edward Snowden : depuis le début de l’année, des millions d’utilisateurs de WhatsApp ont quitté, totalement ou partiellement, la messagerie. Cette application, très populaire, et propriété de Facebook depuis 2014, revendiquait en février 2020 deux milliards d’utilisateurs dans le monde.

S’il est impossible de connaître l’ampleur exacte du phénomène, des estimations de téléchargements, calculés par l’entreprise Sensor Tower pour le Financial Times montrent une baisse de 14 % des nouvelles installations de WhatsApp entre la première et la deuxième semaine de janvier 2021. Sur la même période, l’entreprise a aussi noté une explosion des installations de Telegram (11,9 millions en une semaine, + 90 %) et surtout de Signal (8,8 millions en une semaine, + 3 400 %) : deux messageries fonctionnant sur iPhone comme sur smartphones Android, et promettant de respecter la vie privée de leurs utilisateurs.

A l’origine de ces changements se trouve d’abord une nouvelle version des conditions d’utilisation de WhatsApp, qui a été publiée ce 4 janvier. Cette courte mise à jour des règles de l’application a été le point de départ d’un mouvement de défiance, alimenté par le partage des données mentionné avec la maison mère de WhatsApp, Facebook, et qui a été amplifié par de multiples facteurs.

  • Un message incompréhensible

La dernière mise à jour des règles d’utilisation de WhatsApp est, de prime abord, presque incompréhensible pour les utilisateurs n’ayant pas forcément suivi dans le détail les évolutions des rouages techniques de l’application.

Les principaux points mis en avant par l’entreprise, dans un message ayant « poppé » chez tous les utilisateurs de WhatsApp, évoquent de manière floue des « informations supplémentaires sur la manière dont [Whatsapp] traite vos données » et la manière dont WhatsApp « travaille avec des entreprises qui utilisent Facebook ou des tiers pour aider à stocker et à mieux gérer leurs communications avec vous sur WhatsApp ».

Des formulations à la fois très « langue de bois » et un peu effrayantes, puisqu’elles semblaient indiquer que des informations issues de conversations tenues sur WhatsApp pouvaient être partagées avec des entreprises tierces. Ce qui n’est pas le cas. Mais WhatsApp a dû multiplier, ces derniers jours, les messages d’explications pour détailler les changements mis en place début janvier et rappeler que les messages échangés sur l’application sont toujours entièrement chiffrés et donc privés (il est impossible pour WhatsApp et Facebook d’avoir accès au contenu des messages échangés).

  • Des notifications menaçantes

Autre point qui semble avoir effrayé de nombreux mobinautes : la formulation passablement menaçante des avertissements envoyés aux utilisateurs pour les informer des nouvelles conditions d’utilisation du service. Le texte qui s’est affiché aux utilisateurs français indiquait ainsi qu’il fallait forcément les accepter avant le 8 février prochain « pour continuer à utiliser WhatsApp ».

Le message qui s’est affiché chez les utilisateurs français de WhatsApp sur iPhone concernant les nouvelles conditions générales d’utilisation.

Face à l’ampleur des craintes et de témoignages d’utilisateurs décidant de passer sur Signal ou Télégram, WhatsApp a fait marche arrière et annoncé, le 15 janvier, qu’il repousserait finalement de trois mois l’application de ses nouvelles règles : les utilisateurs ont désormais jusqu’au 15 mai pour les accepter, et WhatsApp a promis de faire preuve de pédagogie pour contrer la « désinformation » dont le service s’estime victime.

Mais de très nombreux témoignages, publiés notamment directement sur la page Facebook de WhatsApp, disent toutefois la colère d’utilisateurs qui ont peu apprécié de se voir intimer l’ordre d’accepter très vite de nouvelles conditions liées à leurs données personnelles, sous peine de se voir purement et simplement couper l’accès à l’application. « Rappelez-vous, vous avez menacé tous vos utilisateurs en disant que si l’on n’acceptait pas les nouvelles règles, nos comptes seraient suspendus », écrit ainsi une ex-utilisatrice sous le dernier communiqué publié par WhatsApp sur Facebook. « C’est intéressant de voir à quel point vous avez changé la manière d’expliquer cette menace, hein. »

  • Un lourd passif chez Facebook

Ce n’est pas la première, ni certainement la dernière fois, qu’un changement des règles d’utilisation d’un service appartenant à Facebook effraye ses utilisateurs. Par le passé, Facebook a procédé à de multiples modifications controversées de ses conditions d’utilisation, et l’entreprise a régulièrement enchaîné les scandales liés à la vie privée.

Depuis la création du « mur » Facebook, imposé sans concertation et très critiqué à ses débuts, jusqu’au scandale Cambridge Analytica, où les données issues d’un questionnaire ont pu être analysées dans un but politique, les utilisateurs, même accros aux produits Facebook (Facebook, Messenger, Instagram, WhatsApp…), restent très méfiants envers ce que Facebook « sait » d’eux et collecte comme données.

  • Le Tweet d’Elon Musk

L’exode des utilisateurs de WhatsApp a également été encouragé par le patron de Tesla, Elon Musk. Le 7 janvier, il recommandait à ses 42,5 millions d’abonnés Twitter d’utiliser Signal, l’application de messagerie très protectrice de la vie privée. M. Musk ne mentionnait pas spécifiquement les questions entourant les données des utilisateurs de WhatsApp, mais ses admirateurs semblent avoir parfaitement reçu le message.

Au-delà de son nombre d’abonnés, Elon Musk est aussi une figure particulièrement influente : début janvier, il a dépassé Jeff Bezos (Amazon) pour devenir l’homme le plus riche du monde. Ses conseils et marottes sont scrutés de très près par des millions d’investisseurs amateurs ou professionnels dans le monde. Après son message, une entreprise appelée Signal Advance a ainsi vu son cours en Bourse multiplié par dix – alors qu’elle n’a rien à voir avec l’application de messagerie.

  • Changer de messagerie est assez simple

Dernier facteur qui a facilité la migration des utilisateurs : il est assez simple de changer de messagerie. Passer de WhatsApp à Signal ou Telegram, ou l’inverse, ne demande aucune manipulation technique élaborée, et le carnet de contacts est automatiquement importé dans une nouvelle application. Il suffit alors de convaincre ses interlocuteurs habituels de changer d’application.

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Paradoxalement, les données issues de Google Trends, qui permet de voir l’évolution des recherches en ligne, tout comme les volumes de commentaires critiques sur les réseaux sociaux, semblent suggérer que les nouvelles règles de WhatsApp ont suscité bien moins de colère que… le dernier changement de règles d’Instragram.

Très critiquée, la dernière mise à jour de l’application avait poussé des utilisateurs à annoncer qu’ils la désinstallaient. Mais contrairement à WhatsApp, Instagram n’a pas véritablement d’alternative : l’exode avait donc été bien plus limité.

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