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Coronavirus : des salariés demandent l’arrêt du travail chez Amazon en France

Des employés se mobilisent contre des conditions de sécurité jugées insuffisantes et mal appliquées. Certains appellent à la grève, d’autres veulent exercer leur droit de retrait.

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Publié le 18 mars 2020 à 12h49, modifié le 18 mars 2020 à 13h28

Temps de Lecture 4 min.

Sur le site Amazon de Lauwin-Planque (Nord), en décembre 2019.

« On ne blague pas avec le Covid-19 : Amazon doit prendre ses responsabilités et demander à ses salariés de se confiner afin de limiter la propagation du virus ! » Le mot d’ordre résume la mobilisation naissante parmi certains salariés français du leadeur mondial de la vente en ligne. Cette revendication est extraite d’un tract qui appelait à la grève et à un rassemblement sur le parking de l’entrepôt d’Amazon à Saran, près d’Orléans, de 11 heures à 15 heures, ce mercredi 18 mars. Il est soutenu par les syndicats CGT, SUD, UNSA, CFE-CGC et CAT.

Depuis mardi, des salariés d’autres sites d’Amazon se mobilisent contre des conditions de sécurité jugées insuffisantes et mal appliquées, à Lauwin-Planque (Nord), à Chalon-sur-Saône (Saône-et-Loire) et à Montelimar (Drôme), énumère Julien Vincent, délégué général CFDT Amazon. L’élu rapporte que des suspicions de cas de coronavirus ont été relevés sur les sites de Chalon-sur-Saône et de Boves (Somme) mais sans diagnostic officiel, faute de test, rapportent les élus syndicaux.

« Les gens ont peur, explique Gaël Begot, élu CGT à Lauwin-Planque. Les consignes contre le coronavirus ne sont pas respectées sur le site : on manque de gel hydroalcoolique, les gens ne peuvent se tenir à un mètre les uns des autres quand ils badgent ou à la cantine, on nous demande de tenir des rampes en métal que tout le monde touche… Pour Amazon, c’est le pognon avant tout. »

Les cadres en télétravail

« Les distances de sécurité entre salariés ne sont pas respectées pendant le travail et les pauses », abonde Khaled Bouchajra, élu CGT du site de Saran, photos à l’appui. « Le gouvernement préconise de ne pas côtoyer plus de cinq personnes hors de son cercle familial, ce qui n’est pas possible sur les sites d’Amazon », dénonce le tract intersyndical.

Les nettoyages ont été renforcés et les employés sont tenus de désinfecter leur poste après chaque tranche de travail

Contacté, le groupe dit « placer la santé de ses employés et de ses partenaires en priorité absolue ». L’entreprise a conseillé le télétravail à tous ses salariés dont l’activité permet de rester chez soi. Ce qui est le cas des cadres, mais pas des nombreux employés des entrepôts, chargés de la logistique des colis vendus en ligne. Pour eux, le géant américain dit suivre les recommandations sanitaires du gouvernement sur tous ses sites. Les nettoyages ont été renforcés et les employés sont tenus de désinfecter leur poste après chaque tranche de travail. Les lieux de travail et de repos ont été aménagés, avec des autocollants au sol indiquant les distances à respecter, ajoute-t-on. Les pauses auraient aussi été échelonnées pour réduire le nombre de gens en contact, toujours selon Amazon.

Pour faire face à l’afflux de demandes de livraison émanant de clients confinés dans le monde, l’entreprise de Jeff Bezos a aussi annoncé, mardi 17 mars, l’embauche de 100 000 employés à temps plein ou partiel. Et une hausse temporaire du salaire horaire de deux dollars ou deux euros, aux Etats-Unis et en Europe, jusqu’à fin avril.

« Amazon joue avec notre santé en continuant d’intégrer des intérimaires dans un contexte où la promiscuité est à proscrire », rétorque l’intersyndicale de Saran. A Lauwin-Planque, 300 employés temporaires ont été intégrés au cours des trois derniers jours, selon M. Begot. Et, au total, 3 000 personnes travaillent aujourd’hui sur le site, qui compte 1 743 employés à plein-temps, affirme l’élu. L’activité est inférieure au gros pic de Noël (jusqu’à 5 000 employés) mais supérieure à la moyenne (autour de 2 500), explique encore le délégué CGT.

Le droit de retrait envisagé

« La hausse de salaire temporaire de deux euros par heure, c’est comme un bonbon donné à un enfant pour qu’il reste sage », critique encore l’élu.

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Pour faire pression sur la direction, plus d’une centaine d’employés ont exercé leur droit de retrait, estimant que le coronavirus les met en danger sur leur lieu de travail, selon la CFDT. C’est ce que préconise aussi Jean-François Bérot, responsable syndical SUD-Solidaires à Saran, cité par La République du Centre. Et M. Begot à Lauwin-Planque. « Mais la direction met la pression sur les employés, qui ont peur de perdre leur job s’ils demandent à exercer leur droit de retrait », selon l’élu. Le responsable CGT dit avoir rencontré, mardi, la préfecture du Loiret, avec d’autres responsables syndicaux, afin d’alerter sur la situation.

De son côté, Amazon communique depuis mardi sur l’utilité de son activité en temps de confinement : « Les clients n’ont, pour beaucoup, pas d’autre moyen d’obtenir des produits essentiels », argumente-t-on. L’entreprise dit prioriser temporairement les « produits de nécessité » dans les livraisons de vendeurs vers ses entrepôts. Pour les élus de Saran, l’activité de la société n’est pas « essentielle ».

Cinq cas en Italie et en Espagne

En Italie et en Espagne, cinq cas de Covid-19 se sont déclarés chez des employés du groupe, selon l’agence Bloomberg. La direction a décidé de ne pas fermer les trois sites concernés, rapporte la dépêche. Cette politique de continuation d’activité a suscité un appel à la grève sur le site italien de Castel San Giovanni (au sud de Milan), affirme Bloomberg.

Aux Etats-Unis aussi, des employés jugent les mesures de protection trop faibles chez Amazon. Un collectif de salariés a lancé une pétition demandant des gestes de la direction pour compenser la « pression » créée par la hausse des commandes : suspension de l’application des quotas de productivité et de leur hausse, augmentation de 50 % des salaires, accès au congé maladie même sans diagnostic officiel du coronavirus, en raison de la pénurie de tests… Les 1 500 pétitionnaires demandent aussi que les frais de garde d’enfants soient couverts par le fonds de 25 millions de dollars (22,8 milliards d’euros) que le groupe a mis en place pour aider financièrement les intérimaires et livreurs indépendants atteints par le coronavirus.

Plusieurs employés dénoncent une injustice par rapport aux cadres qui télétravaillent : « Nous, simples petits ouvriers, avons juste le droit d’être confrontés à notre cher petit virus et de potentiellement le transmettre à nos proches et tout ça, avec le sourire », ironise le tract de Saran.

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