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Chronique «le Fil vert»

La disparition des insectes se confirme

Fil vert, les chroniquesdossier
Une nouvelle étude allemande étaye encore plus la disparition des insectes en Europe et pointe du doigt le modèle agricole.
par Olivier Monod
publié le 15 novembre 2019 à 6h47
(mis à jour le 17 novembre 2019 à 11h21)

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On les croit grouillants et résistants à tout mais les insectes aussi souffrent de l'activité humaine. Les preuves de la chute de la biodiversité s'accumulent. Selon une récente étude allemande, la biomasse des arthropodes a diminué de 67 % en dix ans dans les prairies et de 41 % dans les forêts.

Cette recherche est inédite par son ampleur. Les scientifiques ont analysé les données de 150 prairies et 140 forêts en Allemagne pour 2 700 espèces d'arthropodes (insectes, araignées, mille-pattes, etc.) sur dix ans. Les résultats ont été publiés dans la revue Nature le 31 octobre.

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Les données annoncées sont en ligne avec d'autres publications précédentes. Une étude hollandaise évoque une baisse de 75 % de la biomasse des insectes volants en vingt-sept ans. Des Américains observent une baisse de 83 % de l'abondance des coléoptères en quarante ans dans une forêt du New Hampshire.

En France, Vincent Bretagnolle, écologue au Centre d'études biologiques de Chizé a déjà alerté sur la disparition des oiseaux dans les campagnes. Il a aussi des résultats sur les insectes. «Concernant les carabes [des coléoptères, ndlr], par exemple, nous observons une diminution de 85 % de la biomasse en 25 ans», déclare-t-il.

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Pas de solution miracle

Si le constat est de plus en plus clair, la marche à suivre le devient aussi. Mais elle n'est pas simple. «Le résultat le plus fort de cette recherche est la corrélation entre la vitesse de la chute de la biodiversité sur une parcelle et la densité des terres cultivées dans le paysage alentour», commente Philippe Grandcolas, directeur de recherche CNRS au Muséum d'histoire naturelle.

En clair, la bonne échelle pour agir n’est pas locale. Il faudrait plutôt s’intéresser à l’échelle du paysage et assurer une plus grande diversité des habitats. C’est tout un système agricole qui est à revoir si l’on veut enrayer cette chute, de la consommation au mode de production.

Les chercheurs sont mobilisés sur le sujet. Plusieurs sociétés savantes européennes ont signé, le 5 novembre, une lettre ouverte à destination des parlementaires européens intitulée «réforme de la politique agricole commune : une agriculture nuisible détruit la nature». La lettre est à l'initiative de l'Union européenne des ornithologues dans le cadre des négociations autour de la PAC. «La PAC transforme les zones rurales en déserts verts de monocultures inhabitables à rendement maximal», écrivent-ils. Ils plaident pour une réforme visant à soutenir «une agriculture diversifiée et durable».

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