Chronique. Ce fut la marque de son ambition, la signature de son arrivée à la tête de l’entreprise. Quelques semaines à peine après sa prise de fonctions, en mai 2016, le nouveau patron de Bayer, Werner Baumann, décidait de faire l’acquisition de Monsanto, la célèbre firme agrochimique américaine. Pour un peu plus de 60 milliards d’euros, l’affaire fut entendue en quelques mois, validée par les grandes autorités de la concurrence de la planète. L’intégration des deux structures fut lancée à l’automne, en même temps que fut prise la décision d’abandonner le nom de l’entreprise absorbée, lesté de trop de scandales sanitaires et environnementaux.
L’avenir dira si cette opération fut, pour Bayer, une bonne idée. Mais pour l’heure, c’est peu de dire que quelques nuages s’accumulent sur l’avenir de « Bayanto », ce nouveau géant de la chimie, de la pharmacie, des biotechnologies, des semences et des pesticides. Trois de ces nuages sont particulièrement menaçants.
Un « cancérogène probable »
Le premier, nul ne peut plus l’ignorer, est le risque juridique encouru par l’entreprise aux Etats-Unis. Mercredi 27 mars, Bayer a été condamné à verser près de 81 millions de dollars (environ 72 millions d’euros) à un particulier victime d’un lymphome non hodgkinien, attribué à son utilisation intensive de Roundup.
Contrairement aux éléments de langage promus par la société, la condamnation ne porte pas sur un simple défaut d’étiquetage : après avoir écouté les experts commis par les deux parties, les jurés ont estimé – à tort ou à raison – que l’herbicide avait été un « facteur substantiel » dans le déclenchement de la maladie du plaignant.
Bayer a annoncé faire appel du jugement, mais les investisseurs n’en commencent pas moins à plier les gaules. L’action Bayer oscille ces jours-ci autour de 57 euros, soit une baisse de 60 % par rapport à avril 2015, où elle atteignait des records. Bayer pèse aujourd’hui 10 milliards d’euros de moins que les 63 milliards d’euros déboursés pour acheter Monsanto…
Cette condamnation de Bayer par la justice fédérale américaine succède à un jugement rendu par un tribunal de l’Etat de Californie qui a également condamné la société à verser de larges indemnités (289 millions de dollars) à un jardinier touché par un autre lymphome non hodgkinien, attribué au même produit. Bayer a fait appel de la somme, ramenée à 78 millions de dollars, puis appel sur le fond.
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