Doit-on se féliciter du World cleanup day qui a mobilisé des millions d'individus?... une hirondelle ne fait pas le printemps, un jour de collecte ne réglera rien.
Le ramassage des ordures sur les plages, aussi photogénique et sympathique qu'il soit, ne fait pas une politique.
Il est désormais évident que nous devons modifier nos modes de consommation, et ce dans l'urgence.
Ce type d'événement est sans doute essentiel à la sensibilisation aux causes environnementales, néanmoins pas un jour ne passe sans que nous soyons alertés par les désastres que représentent les déchets plastiques dans nos mers, ni que des initiatives privées ou publiques n'apparaissent pour lutter contre cette pollution.
Les chiffres parlent d'eux-mêmes.
Notre consommation de plastique atteint des niveaux affolants:
- Plus de 500 milliards de sacs plastiques jetables sont utilisés chaque année
- Un million de bouteilles en plastique sont achetées chaque minute dans le monde
Bref, nous utilisons et jetons chaque année l'équivalent de notre poids corporel en plastique.
Aussi certainement que tous les chemins mènent à Rome, tous les plastiques vont à la mer.
Les chiffres relatifs à la dispersion des plastiques dans la mer sont astronomiques:
- Chaque minute, l'équivalent d'un camion de poubelle de plastique est déversé dans l'océan.
- Chaque année, jusqu'à 13 millions de tonnes de plastique se retrouvent dans nos océans.
- WWF estime qu'il y a au moins 86 millions de tonnes de plastique dans les océans.
Ainsi naissent les tristement connus "continents de plastiques", les déchets provenant des littoraux et des navires se désagrègent et flottent pendant des années avant de venir s'y agglutiner. L'exemple le plus désastreux est sans doute le gyre subtropical du Pacifique nord: un immense vortex mesurant près de 3 fois la superficie de la France, ou la rivière de Beyrouth, si polluée par les plastiques qu'il semblerait plus approprié de parler de "tapis roulant décharge".
Mare Nostum Pollution Nostum
River Rill, Hay Al-Salman il ya quelques temps..... Je ne sais pas quoi dire les mots me manquent.
Ces déchets plastiques déversés dans la mer menacent directement la faune marine, près de 500 zones mortes (déficitaires en oxygène dissout), recouvrant près de 245.000 km2, soit la superficie du Royaume-Uni.
Presque toutes les espèces marines sont désormais en contact avec les plastiques, causant la mort de plus d'un million d'oiseaux marins et 100.000 mammifères marins chaque année.
Et cela ne devrait pas aller en s'améliorant: on estime que d'ici 2050, on trouvera plus de plastique que de poissons dans nos océans.
Toujours d'ici 2050, 99% des oiseaux marins auront ingéré du plastique, sous forme de en micro ou nano particules.
Du plastique jusque dans nos assiettes
Le plastique est aussi omniprésent dans les cantines scolaires, à travers les assiettes mais aussi les barquettes de conditionnement et les poches de cuissons. Un lot de poches de plastique perdant environ 1 gramme après passage en cuisson, ce gramme finissant dans l'assiette de nos enfants.
Lire et écouter Madame Dr Isabella Annesi-Maesano Directeur de Recherche (DR1) INSERM / INSERM, Spécialiste des maladies respiratoires; et ne plus jamais regarder un sac plastique de la même façon.
La situation est plus que préoccupante, nous frôlons l'irréversibilité à l'échelle d'une vie humaine
Le chemin vers l'objectif zéro plastique est engagé, notamment à travers la loi Egalim sur l'alimentation, en cours de navette au Parlement. Cette loi devrait apporter sa contribution modeste à la lutte contre les matières plastiques, en interdisant, dans un délai assez court, les ustensiles plastiques dans les cantines scolaires et un introduisant un système de bonus-malus d'ici 2019, le gouvernement souhaitant arriver à un taux intégral de recyclage des plastiques d'ici 2025.
L'Assemblée nationale a voté de son côté l'interdiction de couverts et de contenants en plastique d'ici 2020, mesure venant s'ajouter à l'interdiction des pailles et mélangeurs en plastique votée par le Sénat.
A l'échelle européenne, la Commission cherche à limiter la pollution plastique en ciblant 10 produits plastiques à usage unique, tels que les pailles, cotons tiges ou gobelets en plastique. Ces produits seront interdits dès lors qu'il existe une alternative de remplacement abordable.
L'ONU a lancé une campagne d'envergure mondiale: #OcéansPropres visant à mettre fin aux déchets marins. Cette campagne vise l'élimination de deux sources majeures de déchets marins: les micro-plastiques présents dans les cosmétiques et l'utilisation excessive de plastique à usage unique. L'ONU appelle les gouvernements à mettre en place des politiques de réduction du plastique, cela implique pour les industries de minimiser les emballages plastiques et repenser la conception des produits.
Les clefs de la réussite de ces politiques publiques sont aux mains des consommateurs: il est primordial de changer nos habitudes du "tout jetable".
Les mesures nationales et internationales doivent être accompagnées d'actions de sensibilisations de proximité, il faut faire plus, mieux et plus vite!
Les citoyens se sont emparés du sujet, partout dans le monde
Une récente initiative au Liban, à Tripoli, mobilise l'ensemble de la population. A l'initiative de la Fondation Omar Harfouch, la Chambre de Commerce a décidé une guerre à la pollution, avec une politique 0 sac plastique pour venir à bout d'une décharge à ciel ouvert de près de 45m de haut, grâce, sans doute, à des procédés novateurs promus notamment par les Nations Unies qui soutiennent des programmes innovants sous la houlette ferme et magistrale de Philippe Douste-Blazy, Secrétaire général adjoint de l'ONU.
Les nouvelles générations doivent réaliser l'ampleur des dégâts et être prêts à adopter des mesures dans leur propre intérêt, celles que leurs parents n'ont pas eues la volonté de prendre.
Chacun doit agir à son échelle, notamment par le tri sélectif, un geste qui n'est toujours pas devenu automatique!
La France doit suivre l'exemple de la ville de San Francisco, qui par des mesures incitatives, pourrait devenir la première ville à atteindre le zéro déchet d'ici 2020.
Il est temps d'en finir avec le gaspillage alimentaire, l'excès de packaging et le fléau du plastique.
Les lobbies et les grandes multinationales n'ont pas leur place dans cette affaire! Il faut agir dans l'urgence, les "peut-être", "plus tard" etc n'ont plus leur place!
Outre la mobilisation citoyenne, une clé réside sans aucun doute dans la recherche. Il serait probablement utile de réfléchir à un fonds de dotation européen ou national, pour accélérer la recherche fondamentale et trouver des alternatives aux plastiques, à l'exemple de chercheurs chiliens qui ont réussi à créer un sac plastique biodégradable qui se dissout dans l'eau. Ce produit est un dérivé de roche calcaire qui n'a pas d'impact environnemental.
Éduquer, changer nos comportements individuels, renforcer la recherche, telles sont les pistes de travail.
La tâche est immense, mais essentielle à notre survie, le mot n'est pas trop fort!
Nous n'héritons pas de nos parents, nous empruntons à nos enfants auxquels nous léguons une planète en bien piteux état.
À voir également sur Le HuffPost:
LIRE AUSSI
- L'Assemblée vote l'interdiction des couverts et de contenants jetables en plastique Un poisson retrouvé avec un gobelet en plastique dans l'estomac en Corse choque